Un monument à lire et relire à différents moments de la vie
5 estrellas
Je vais répondre à deux questions : "Faut-il relire des romans / livres / récit ?" et "Pourquoi relire ?" Un avis très personnel donc.
J'ai lu Le Maitre et Marguerite, il y a 30 ans de cela. Je l'ai lu dans un contexte particulier : un voyage en URSS. C'était en 1989. L'URSS existait encore. Gorbatchev en était le président. La Glasnost soufflait son vent (plutôt sa brise) de liberté. Les rues de Kiev étaient remplies de rassemblements spontanés...
Qu'ait je ressenti de la lecture de ce roman à l'époque ? J'en ai quelques souvenirs diffus : une sensation de "fantastique", des personnages marquants.
Honnêtement guère plus. Ah si j'avais pris des notes...
Mais trente ans après je suis certain que bien des choses mon échappée à l'époque. Je vais vous expliquer cela avec quelques citations
L’amour surgit devant nous comme surgit de terre l’assassin au coin d’une ruelle …
Je vais répondre à deux questions : "Faut-il relire des romans / livres / récit ?" et "Pourquoi relire ?" Un avis très personnel donc.
J'ai lu Le Maitre et Marguerite, il y a 30 ans de cela. Je l'ai lu dans un contexte particulier : un voyage en URSS. C'était en 1989. L'URSS existait encore. Gorbatchev en était le président. La Glasnost soufflait son vent (plutôt sa brise) de liberté. Les rues de Kiev étaient remplies de rassemblements spontanés...
Qu'ait je ressenti de la lecture de ce roman à l'époque ? J'en ai quelques souvenirs diffus : une sensation de "fantastique", des personnages marquants.
Honnêtement guère plus. Ah si j'avais pris des notes...
Mais trente ans après je suis certain que bien des choses mon échappée à l'époque. Je vais vous expliquer cela avec quelques citations
L’amour surgit devant nous comme surgit de terre l’assassin au coin d’une ruelle obscure et nous frappa tous deux d’un coup. Ainsi frappe la foudre, ainsi frappe le poignard ! Elle affirma d’ailleurs par la suite que les choses ne s’étaient pas passées ainsi puisque nous nous aimions, évidemment, depuis très longtemps, depuis toujours, sans nous connaître, sans nous être jamais vus
« — Ma pauvre, pauvre amie, lui dis-je. Je ne veux pas que tu fasses cela. Tu ne seras pas heureuse avec moi, et je ne veux pas que tu te perdes avec moi.« — C’est la seule raison ? demanda-t-elle en approchant ses yeux tout près des miens.« — La seule.« Avec une excessive vivacité, elle se serra contre moi, noua ses bras autour de mon cou et dit :« — Eh bien, je me perds avec toi. Demain matin je serai ici.
Je n'avais aimé ou été aimé pour ressentir toute la portée de ce genre de passage.
J'ai depuis vécu et compris ce genre de rencontre.
Ce genre de rencontre où les sentiments sont d'une lumineuse évidence.
Qu'avais-je compris de ce passage à l'époque ? Sans doute bien trop peu.
Même sublimement écrit, je ne sais pas si cette expérience peu être vraiment complètement transmise.
Je lui ai dit que tout pouvoir est une violence exercée sur les gens, et que le temps viendra où il n’y aura plus de pouvoir, ni celui des Césars, ni aucun autre. L’homme entrera dans le règne de la vérité et de la justice, où tout pouvoir sera devenu inutile.
En 30 ans, j'ai fait un long chemin politique. Le roman dénonce parfois de façon directe, parfois de façon burlesque le régime oppressif d'alors.
Je ne mesure que maintenant à quel point les conditions particulières (aussi bien locales que temporelles) de l'écriture du roman ont permis d'atteindre l'universel.
Mikhaïl Boulgakov dénonce cet "homme nouveau" qui devait surgir du communisme.
Il montre brillamment que ce n'est que foutaises. L'Homme est vil, paresseux, vindicatif et lâche.
Il faut reconnaître que parmi les intellectuels, on rencontre parfois, à titre exceptionnel, des gens intelligents
Que vont donner le pouvoir actuel et sa la violence physique, économique actuelle sur les gens ?
Un autre homme nouveau ? Un Auto-Intra-Extra-Héro-Entrepreneur dynamique éco responsable intelligent ?
Et bien, Mikhaïl Boulgakov nous montre toute une série de personnages profondément, lâchement humains (il ne s'exclut pas).
Il faut relire le Maitre et Marguerite 30 ans après pour percevoir à quel point le tableau est juste.
La seule chose qu’il a dite, c’est que, parmi tous les défauts humains, il considérait que l’un des plus graves était la lâcheté.
Il se compte parmi les lâches. Il a pourtant écrit personnellement à Staline pour qu'il le laisse oeuvrer.
À 20 ans, a-t-on assez lâchement renié ses principes et ses valeurs ?
Certainement pas.
Mais maintenant ?
Mais dites-moi : pour vous convaincre que Dostoïevski est un écrivain, faudrait-il que vous lui demandiez un certificat ? Prenez seulement cinq pages de n’importe lequel de ses romans et, sans aucune espèce de certificat, vous serez tout de suite convaincue que vous avez affaire à un écrivain. D’ailleurs, je suppose que lui-même n’a jamais possédé le moindre certificat !
Dans le roman, Mikhaïl Boulgakov se moque de ces artistes "officiels" encartés.
J'ai certainement pensé à l'époque que c'était irrelevant (les artistes sont "libres"...).
Mais maintenant en regardant tous ces "écrivains à succès / à prix", ces artistes qui "vendent (bien)", sommes-nous si loin de ces "artistes officiels" ?
L’homme est mortel et, comme quelqu’un l’a très justement dit, inopinément mortel.
Le roman est celui d'un écrivain qui se sait mortel, qui se sait mourant.
Rappelle-toi que si tu ne réussis pas ta vie tu réussiras ta mort… C’est Nietzsche, je crois, qui a dit cela dans Zarathoustra. Quelle prétention absurde !
A 20 ans, la mortalité ? La mort est tellement escamotée en occident.
En conclusion
Oui il faut relire des romans. Sans doute pas tous. mais
OUI il faut relire le Maitre et Marguerite.
Peut être faut-il attendre, 10, 20, 30 ans que la politique, la vie, la mort, l'amour, la lâcheté passent rendre visite pour saisir en partie ce roman.
Vais-je relire le Maitre et Marguerite ?
Oui c'est un roman "monde" qui contient tellement de thèmes, de niveaux, de symboles.
Il en reste beaucoup qui ne me sont pas accessible. Je pense, par exemple, à une des trames du récit : Pons Pilate qui a condamné un homme.